La pollution par les pesticides.

Video :Bertrand Pouchin, "Assiégé par les pesticides"




 Resumé : En juillet 2004 Bertrand Pouchin et sa femme font l'acquisition d'une maison dans un minuscule village de l'Eure-et-Loir, aux confins du Perche, afin d'offrir à leurs deux enfants, aujourd'hui âgés de 4 et 5 ans, « de l'air et le contact avec la nature ».

Ils pensent avoir gagné « un petit coin de paradis ». En mars 2005, alors qu'ils fêtent l'anniversaire de l'un de leurs enfants dans le jardin, où se trouvent une vingtaine de personnes, surgit l'énorme tracteur automoteur de l'un de leurs voisins agriculteur, qui commence à épandre un nuage de pesticides à l'odeur nauséabonde sur le champ qui entoure leur maison. Le tracteur roule à un mètre de la haie, et la rampe d'épandage déborde carrément au-dessus de la petite haie du jardin.

Ainhoa S

Pollution par les pesticides : il n'y a pas que la Martinique qui trinque ...


Emma D.

Les pesticides

Dans les pays industrialisés, la révolution verte des années 60 a considérablement augmenté la productivité agricole en jouant sur l'augmentation des surfaces cultivées, la mécanisation, la plantation de cultures sélectionnées et hybrides aux rendements plus élevés, le remembrement et la lutte contre toutes les nuisances.
Cette lutte passe notamment par le recours massif aux pesticides, qui sont des produits chimiques dangereux destinés à repousser ou tuer les rongeurs, champignons, maladies, insectes et "mauvaises herbes" qui fragilisent le mode de culture intensif.

Les pesticides ne sont pas seulement utilisés dans l'agriculture mais aussi dans le jardin du particulier, dans les parcs ouverts au public, pour l'entretien de la voirie, des voies ferrées, des aires de loisirs (golfs, hippodromes...).

Les pesticides sont des Polluants Organiques Persistants qui perdurent dans l'environnement, s'accumulent dans les graisses et sont, d'une manière générale, dangereux pour la santé : cancers, altération du système immunitaire, problèmes de reproduction...

Les pesticides touchent aussi massivement les zones rurales des PVD (Pays en Voie de Développement) où malformations, cancers, maladies congénitales, désordres du système nerveux déciment la population.

Ainhoa S



Définitions

Un pesticide est un produit chimique destiné originellement à la protection des cultures afin de lutter contre des tiers jugés nuisibles comme les parasites, mauvaises herbes, insectes et champignons.
Ainsi, on désigne par pesticide tout substance destinée à repousser, détruire ou combattre les ravageurs et les espèces indésirables de plantes ou d'animaux. Sont également inclus les régulateurs de croissance des plantes, les défoliants (pour faire tomber les feuilles), les dessicants (pour absorber l'humidité), les agents qui réduisent le nombre de fruits ou évitent leur chute précoce ainsi que les substances appliquéesavant ou après récolte pour conserver les produits pendant leur stockage et leur transport (Rapport d'information sur les pesticides - Assemblée Nationale, 02/06/2009)

Ainhoa S.


Des Polluants Organiques Persistants

Tous les pesticides organochlorés de première génération sont des POP (Polluants Organiques Persistants) dont voici les principales caractéristiques :

ils perdurent dans l'environnement
ils s'accumulent dans les graisses et via la chaîne alimentaire notamment chez les super-prédateurs comme l'Homme
ils sont dispersés dans l'environnement via les courants atmosphériques et marins
ils sont dangereux pour la santé : cancers, altération du système immunitaire, problèmes de reproduction...
12 POP ont été recensés par le Programme des Nations Unies pour l'Environnement (PNUE) et interdits dans de nombreux pays comme l'Union Européenne (UE) et les Etats-Unis lors de la convention de Stockholm en mai 2001.
Bien que ces POP ne soient plus utilisés dans les pays industrialisés depuis plus de 20 ans, ils perdurent encore dans les écosystèmes et donc dans nos aliments.

De plus, les organochlorés interdits ont été remplacés par de nombreuses autres familles chimiques dont les organophosphorés moins persistant dans l'environnement mais plus toxiques.

Ainhoa S.



Une consommation planétaire, le cas de la France

Depuis 40 ans, les pesticides touchent tous les pays et les capacités de production des pays en voie de développement sont en pleine expansion.
Ainsi, les pesticides touchent massivement les zones rurales des PVD (Pays en Voie de Développement) où malformations, cancers, maladies congénitales, désordres du système nerveux déciment une population qui souffre déjà de nombreux maux.
Même si les pulvérisations se font petit à petit de plus en plus rares, il demeure des stocks importants de pesticides périmés :

100 000 t en Afrique et au Moyen-Orient
200 000 t en Asie
200 000 t en Europe de l'Est avec la Russie.
Trop souvent, les pesticides sont abandonnés à ciel ouvert...
Pourquoi de telles quantités ? Manque d'équipements, d'informations, achats et dons trop importants, corruption avec les producteurs occidentaux qui se débarrassent à bas prix de leurs stocks de pesticides interdits vers les PVD. Une ONG américaine a ainsi estimé en 1995-1996 que 14 tonnes de pesticides interdits aux Etats-Unis étaient exportés par jour vers le Pakistan et le Vénézuela (SMITH C., ROOT E., 1999).

Au niveau mondial, les ventes augmentent ainsi que la toxicité des produits vendus. Ceci conduit nécessairement à une pollution généralisée des écosystèmes de notre planète.

Ainhoa S.


La consommation française de pesticides

En France, c'est l'Union des industries pour la protection des plantes (UIPP) qui fournit les données sur la vente des pesticides sur le territoire. En 2006, 71 600 tonnes ont été commercialisées dont 90 à 94% étaient destinées à l'agriculture, le reste se partageant équitablement entre les usages amateurs et les usages collectifs (voirie, SNCF...).
La France, première puissance agricole européenne, est particulièrement consommatrice de pesticides puisqu'elle est le premier marché européen de pesticides et le 4e, au plan mondial, derrière les Etats-Unis, le Brésil et le Japon.
L'évolution de la consommation en France montre une diminution des tonnages de substances actives vendues depuis la fin des années 90. Ainsi, 120 500 tonnes de substances actives étaient commercialisées en 1999 contre 71 600 tonnes en 2006, soit une diminution de plus de 40 %. Toutefois, en 2007, 77 300 tonnes de substances actives ont été vendues, une hausse qui s'expliquerait notamment par des conditions climatiques défavorables, propices aux maladies et à l'apparition de nouveaux insectes ravageurs.

La France est également le pays d'Europe qui a le plus de substances autorisées sur le marché : environ 380 début 2007 (Agritox, 08/2007).

La consommation des insecticides et des fongicides tend à stagner au contraire des herbicides comme le Roundup® qui progresse régulièrement.

Ainhoa S.



Une pollution planétaire

Les résidus industriels chimiques et les pesticides sont transportés sur des milliers de kilomètres via le cycle de l'eau et les masses d'air comme en témoigne la contamination des Inuits du Grand Nord Canadien qui vivent pourtant de chasse et de pêche. Les bébés inuits nourris au sein développent jusqu'à quinze fois plus d'otites que ceux du Québec Sud (DEWAILLY E. et al, 2000).
En 1989, l'OMS estimait que les pesticides étaient à l'origine d'un million d'empoisonnements graves et de 220 000 morts par an dans le monde. En août 2007 la célèbre revue médicale "The Lancet" publie même une étude montrant que le suicide aux pesticides fait 300 000 morts par an dans les campagnes asiatiques. Les pays développés qui utilisent 80% des quantités de pesticides ne comptent que la moitié des cas d'intoxication.
Les troubles aigus concernent principalement les muqueuses, la peau, le système digestif et le système respiratoire.

Ainhoa S.



Les pesticides présents dans tous les écosystèmes

Avec des décennies d'agriculture industrielle polluante, des millions de tonnes de pesticides ont été déversées sur les cultures en France, intégrant toutes les composantes de la biosphère : eau, sol, air, végétation, animaux et Homme.
Ainsi, 96% des eaux de surface et 61% des nappes phréatiques en contiennent (IFEN, 09/2006). Ce qui nuit à la qualité de l'eau potable au robinet, mais aussi à quelques eaux de sources et minérales vendues en bouteille.
La Concentration Maximale Admissible (CMA) pour les pesticides dans l'eau distribuée au robinet est de 0,1 µg/l/pesticide et de 0,5 µg/l pour tous les pesticides selon la réglementation européenne (directive 98/83/CE). Cette valeur est dépassée pour des millions de français chaque année (Ministère de la Santé).

L'eau de pluie et le brouillard peuvent contenir respectivement de 0,1 µg/l jusqu'à 14 µg/l de pesticides d'après des relevés de l'INRA (Environnement Magazine, 2000). Une étude d'AirParif de 2007 a même retrouvé une vingtaine de pesticides différents dans l'air de Paris !
En effet, lors de la pulvérisation sur les cultures, on estime que 25 à 75%, voire plus, des quantités se dispersent dans l'atmosphère.
On retrouve par conséquent des résidus de pesticides dans nos aliments comme en témoignent les chiffres suivants :

Ainhoa S.


Les pesticides dans les zones non agricoles

Outre l'agriculture, de nombreux acteurs utilisent les pesticides, au coeur même de la ville et au sein de la population : gestionnaires des routes, des voies ferrées, paysagistes pour l'entretien des espaces verts et jardiniers amateurs !
A titre d'exemple, Réseau Ferré de France (RFF) doit désherber tous les ans 30 000 km de réseau ferré national, un coût de 60 millions d'euros par an, selon RFF.

Pays %        d'échantillons dépassant et les limites autorisées de résidus          % d'échantillons avec
résidus de pesticides:

Hollande                                      14,7%                                                      66,7%
France                                         5,8%                                                        50,8%
Espagne                                      3,6%                                                         35,6%
Allemagne                                    8%                                                           61%
Italie                                           1,3%                                                          33,3%

Moyenne UE +
Norvège, Lischtenstein et Islande 4,7%                                                        44,4%

Or, les pesticides sont des produits chimiques destinés à tuer, il est donc assez logique qu'ils soient nocifs pour notre santé... (1)*

Ainhoa S

Types de pesticides

Les pesticides (insecticides, raticides, fongicides, et herbicides) sont des composés chimiques dotés de propriétés toxicologiques, utilisés par les agriculteurs pour lutter contre les animaux (insectes, rongeurs) ou les plantes (champignons, mauvaises herbes) jugés nuisibles aux plantations. Le premier usage intensif d’un pesticide, le DDT, remonte à l’époque de la seconde guerre mondiale.

Malheureusement, tous les pesticides épandus ne remplissent pas leur emploi. Une grande partie d’entre eux est dispersée dans l’atmosphère, soit lors de leur application, soit par évaporation ou par envol à partir des plantes ou des sols sur lesquels ils ont été répandus. Disséminés par le vent et parfois loin de leur lieu d’épandage, ils retombent avec les pluies directement sur les plans d’eau et sur les sols d’où ils sont ensuite drainés jusque dans les milieux aquatiques par les eaux de pluie (ruissellement et infiltration). Les pesticides sont ainsi aujourd’hui à l’origine d’une pollution diffuse qui contamine toutes les eaux continentales : cours d’eau, eaux souterraines et zones littorales.
Mais la source la plus importante de contamination par des pesticides demeure la négligence : stockage dans de mauvaises conditions, techniques d’application défectueuses, rejet sans précaution de résidus ou d’excédents, ou encore pollutions accidentelles comme, par exemple, lors du rejet accidentel de 1 250 tonnes de pesticides dans le Rhin, en novembre 1986.

Si les pesticides sont d’abord apparus bénéfiques, leurs effets secondaires nocifs ont été rapidement mis en évidence. Leur toxicité, liée à leur structure moléculaire, ne se limite pas en effet aux seules espèces que l’on souhaite éliminer. Ils sont notamment toxiques pour l’homme (voir le chapitre
Eau potable).
Estimer les effets sur les écosystèmes d’une pollution liée aux pesticides s’avère difficile, car il existe un millier de familles de pesticides, soit des dizaines de milliers de pesticides. Ils sont en outre utilisés à faibles doses et leurs comportements sont très divers. Leur impact dépend à la fois de leur mode d’action (certains sont beaucoup plus toxiques que d’autres), de leur persistance dans le temps (certains se dégradent beaucoup plus rapidement que d’autres) et de leurs sous-produits de dégradation lesquels sont parfois plus toxiques et se dégradent moins vite que le composé initial. Leurs effets sur le vivant sont, eux aussi, encore très mal connus.

Les principaux pesticides utilisés actuellement appartiennent à quelques grandes familles chimiques :

  • Les organochlorés (hydrocarbures chlorés), comme le DDT synthétisé dès les années 1940, sont des pesticides très stables chimiquement. Le DDT a été utilisé partout dans le monde dans la lutte contre les insectes, jusqu'à ce que l'on découvre qu’il était peu dégradable et pouvait se concentrer dans les organismes en bout de chaîne alimentaire, par bio-accumulation, avec des risques certains pour la santé humaine. Son utilisation est aujourd’hui interdite dans de nombreux pays tempérés, mais on en trouve encore beaucoup dans les milieux aquatiques. En outre, ils continuent à être employés dans certains pays tropicaux.
  • Les organophosphorés sont des composés de synthèse qui se dégradent assez rapidement dans l’environnement mais qui ont des effets neurotoxiques sur les vertébrés.
  • Les pyréthroïdes sont des insecticides de synthèse très toxiques pour les organismes aquatiques. Une pollution accidentelle des eaux par ces composés peut être dramatique.
  • Les carbamates, très toxiques, sont utilisés comme insecticides et fongicides.
  • Les phytosanitaires, qui regroupent un très grand nombre de produits de la famille des triazines ou des fongicides, représentent plus de la moitié du tonnage annuel des pesticides utilisés en France. Ces produits réagissant avec le sol lors de leur migration (piégeage, relargage, spéciation), l’évaluation de leur devenir et de leur impact se révèle difficile. (2)*
Emma D.


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